Un étrange univers...

 

Blattes, cafards, cancrelats.. Il peut paraître étrange de s'intéresser à de telles créatures. Ces animaux semblent cristalliser ce qu'exècre le plus la société occidentale: la saleté, la maladie, la prolifération, le désordre et surtout une résistance inouïe à nos tentatives de contrôle et d'extermination. Les fourmis jouissent d'une bien meilleure réputation, doit-on s'en étonner?

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A l'univers propre, ordonné et hiérarchisé des fourmis, les blattes semblent en effet opposer un monde anarchique et opportuniste. La société des fourmis bâtit, chasse et élève, le groupe de blattes chaparde, salit et parasite... Un spectacle déplorable qui a conduit de nombreux observateurs à leur refuser le titre d'animaux sociaux, les réduisant de ce fait au rang subalterne d'insectes grégaires... (il est d'ailleurs très intéressant de noter que le comportement grégaire des blattes n'est pas généralisable à l'ordre des blattaria dans sa totalité, de nombreuses espèces ont un comportement solitaire ou mixte).

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Pourtant l'observation des colonies de blattes est fascinante à plus d'un titre: Imaginez une société animale où, hormis un ou plusieurs mâles dominants chez certaines espèces, nulle hiérarchie fixe et systématique n'est établie, les jeunes et les faibles n'ont rien à craindre des forts et, fait remarquable en éthologie: une fois le groupe établi, l'intrusion d'étrangers ne perturbe pas l'organisation de la société et ne déclenche pas de réaction violente!

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Le concept de société ainsi redéfini par les blattes semble se rapprocher d'un groupement d'individus totalement indépendants les uns des autres dont l'action non concertée et non structurée permet néanmoins la survie du groupe. Par un phénomène complexe d'interattraction (l'instinct grégaire est très fort chez la blatte, elle cherche le contact avec ses semblables), le groupement permet de créer une espèce d'organisme constitué de centaines d'yeux et cerques, ce qui va permettre une hypersensibilité à toute modification de l'environnement extérieur. Dès qu'un changement apparaît à l'un des individus, c'est tout le groupe qui est averti immédiatement et qui, se dissolvant anarchiquement, permet la survie du plus grand nombre en égarant l'agresseur.

L'observation des blattes permet ainsi de se plonger à l'origine de toute société, dans les balbutiements de la vie de groupe avant même tout principe d'organisation structurée.... de quoi faire rêver, vous en conviendrez, philosophes, éthologues, entomologistes et autres naturalistes en herbe!

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Louis Bourdat-Sainsevin..

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